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Panafricanisme: MONNAIE, SERVITUDE ET LIBERTE

 
MONNAIE, SERVITUDE ET LIBERTÉ Ouvrage de JOSEPH TCHUNDJANG POUEMI Collection DJEHUTI EXPOSE DU 06/03/04 sur l`ouvrage par MARI-WSAR


Si l’on admet que le pouvoir économique confère le pouvoir politique, alors, on doit admettre que le pouvoir monétaire confère le pouvoir politique. En fait, la monnaie est au coeur même des économies modernes dont elle commande les mouvements. L’afrique indépendante, faute de l’avoir compris, ou en feignant de ne pas le comprendre, soit en démissionnant, sans raison, devant ses responsabilités monétaires, soit en les utilisant pour nourrir une administration répressive, qu’il s’agisse de l’armée ou des "technocrates", a auto-réprimé le système économique et bloqué le progrès. Joseph Tchundjang Pouemi soutient qu’il y a des voies d’espoir et suggère des approches.

EXPOSE DU 06/03/04 SUR L´OUVRAGE DE JOSEPH TCHUNDJANG POUEMI
Par Mari-Wsar

SOMMAIRE :

1 - PRESENTATION DE L´AUTEUR ET DE L´OUVRAGE
2 - INTRODUCTION ET APERÇU HISTORIQUE DE LA MONNAIE
- Comment la monnaie est-elle devenue une créance à vue sur le système bancaire ?
3 - LA MONNAIE, UN BIEN VIDE
- La monnaie, un bien vide qu´il faut remplir
- Le retard de l´Afrique dans l´assimilation du fait monétaire
- Comment expliquer l´endettement excessif de certains pays industrialisés ?
4 - AFRIQUE : LA REPRESSION MONETAIRE
5 - ORGANISER LA RESISTANCE COMMUNE

1 - PRESENTATION DE L´AUTEUR ET DE L´OUVRAGE :


Le Professeur Joseph TCHUNDJANG PUEMI est né Africain-Camerounais le 13 novembre 1937. Il est mort le 27 décembre 1984 dans des circonstances pour le moins mystérieuses. Il enseignait au Centre Universitaire de Douala et était membre titulaire de l´Institut International de Statistiques.

De son très riche cursus universitaire (études de Mathématiques, de Droit et de Sciences Economiques à Clermont-Ferrand et à Paris), il est sorti diplômé du Cycle des Administrateurs en 1967 et Docteur ès Sciences Economiques en 1968 avant de travailler successivement comme Maître-Assistant, Maître de Conférences Agrégé puis Professeur à l´Université de Yaoundé jusqu´en 1975. Il partit ensuite pour la Côte d´Ivoire où il a dirigé le Département d´Economie Publique à l´Université d´Abidjan et collaboré au Bureau National d´Etudes et Techniques du Développement en tant qu´Economiste en Chef. Il a publié entre autres l´autofinancement, facteur probable d´entretien du dualisme (Abidjan 1977), Micro-économie appliquée (Yaoundé 1974).


Ce présent ouvrage, paru en 1979 aux éditions NEA, est le fruit d´un travail de maître où les rudiments des sciences monétaire et économique sortent de la mystification dont elles ont toujours été émaillées. Le souci premier qui a présidé à la production de ce livre est celui de faire sortir l´Afrique de la machiavélique tutelle économique imposée par les puissances impérialistes avec la caution de nos gouvernants. En vrai connaisseur de la science économique, l´auteur démontre au dernier chapitre du livre que quelle que soit l´hostilité de l´ordre économique mondial, si l´Afrique s´unit autour des intérêts qui sont les siens par une intégration économique digne de ce nom, elle sera capable de relever les défis du développement qui s´imposent à elle. "L´Afrique se fera par la monnaie ou ne se fera pas." En posant comme préalable de la réussite économique la création de monnaies nationales ou régionales souveraines, c´est-à-dire non contrôlées de l´extérieur, le Professeur PUEMI n´en sait pas moins qu´au centre du système économique, la monnaie joue un rôle moteur et libératoire. Lorsqu´elle est réprimée, elle paralyse l´Etat et lorsqu´elle est gérée dans le but de remplir le rôle social qui est le sien, elle crée de la richesse et écrase la pauvreté.


2 – INTRODUCTION ET APERÇU HISTORIQUE DE LA MONNAIE :


De sa définition traditionnelle (définition d´Aristote), la monnaie est le bien qui est à la fois moyen de paiement, unité de compte et réserve de valeurs. Elle est une création humaine née de la nécessité pour une communauté, de pouvoir échanger des biens qu´on possède contre d´autres qu´on ne possède pas. Elle repose essentiellement sur le principe d´organisation des échanges selon les règles mathématiques de commensurabilité et de pondérabilité dans le but de garantir l´équité des échanges. Son origine est préhistorique et remonte à la division du travail au sein des premiers groupements humains. Elle est d´abord apparue comme un objet-étalon à partir duquel tous les biens pouvaient êtres évalués afin de les rendre facilement interchangeables. D´où sa première caractéristique : unité de compte ou de calcul économique. Cependant, son expression matérielle en tant que réserve de valeurs n´est apparue qu´au IIème millénaire avant l´ère chrétienne lorsque le besoin de se prémunir contre les aléas de l´avenir a été pressenti. Mais jusque là, elle ne constituait pas un intermédiaire d´échanges en tant que moyen de paiement à caractère fiduciaire. Pour ce faire il a fallu attendre CRESUS (dernier roi de Lydie), au VIème siècle avant l´ère chrétienne pour voir les premières pièces estampillées et garanties par le sceau d´une autorité juridico-politique.


Nous voyons que c´est progressivement au cours des âges que la monnaie a pu remplir les trois fonctions de la définition d´ARISTOTE : moyen de paiement, unité de compte et réserve de valeurs. Cette formule martelée aux Africains n´est guère préjudiciable ; seulement il y a lieu de comprendre à travers le processus d´évolution de la monnaie, le fait que les sciences sociales et humaines évoluent avec le temps selon les besoins des hommes à un moment donné. Cet aspect des choses est souvent ignoré des spécialistes africains qui considèrent les postulats qui nous sont enseignés dans le domaine des sciences socio-humaines comme des "paroles d´évangile". Leur foi aveugle aux enseignements des "maîtres" trahit leur manque d´inventivité et leur incapacité à résoudre les problèmes économiques de l´Afrique, attendant tout des "experts" boréo-occidentaux (1) dont ils sacralisent les enseignements quand bien même certains leur apparaissent idéologiques.


Par ailleurs, s´il reste vrai que la monnaie est un objet de corruption que Mao TSETOUNG prévoyait de supprimer en Chine, il reste indéniable que cet objet "touche dans ses moindres détails notre vie quotidienne en même temps qu´il façonne, au fil des années, celle des générations futures." C´est pourquoi il est indispensable d´en connaître le fonctionnement. En Egypte Antique où les échanges se faisaient par troc, la monnaie était, semble t-il, un objet purement idéale, fictive. Joseph TCHUNDJANG PUEMI savait que la monnaie n´est pas une création de la nature ; et en tant qu´homme libre sachant juger par lui-même, il s´est affranchi de tout dogmatisme vis-à-vis des enseignements des "maîtres" en définissant la monnaie telle qu´elle se présente aujourd´hui : non comme une réserve de valeurs mais comme une créance à vue sur le système bancaire. A partir de ce moment, la matière monétaire a cessé d´être pour lui ce diable inappréhensible aux mille cornes, cette arme silencieuse et de destruction massive à partir de laquelle notre indépendance politique a été confisquée.

Comment la monnaie est-elle devenue une créance à vue sur le système bancaire ?


En Europe pendant l´époque féodale, chaque fief battait sa propre monnaie, le pouvoir étatique était faible et l´Eglise était la seule autorité acceptée par tous. Ses lois sur l´usure étaient infrangibles et ne pouvaient permettre l´expansion économique. Au XIIIè siècle, la restauration et le renforcement du pouvoir royal a permis à l´Europe de sortir de cet immobilisme. Ainsi le taux d´intérêt a été rétabli et l´or est devenu la monnaie universelle comme en Afrique à la même époque (2). L´élan de la Renaissance a libéré toutes les soifs et conduit à la conquête du monde.


Les richesses amassées du Commerce Triangulaire, de l´Esclavage des Noirs (3) et de la spoliation des tribus autochtones d´Amérique ont été énormes. En Angleterre, cela s´est traduit par une prolifération d´entrepôts d´or au XVIIè siècle. Les orfèvres qui tenaient ces entrepôts étaient des véritables intermédiaires financiers comme le sont les banquiers aujourd´hui : "ils recevaient le métal d´une main et le reprêtaient de l´autre. A ceux qui leur remettaient du métal, ils délivraient des récépissés de dépôts qui pouvaient être utilisés comme garantie aux dettes ou comme instruments de paiements à l´instar du chèque aujourd´hui." Ayant ensuite découvert que les demandes de remboursement du métal qui leur était confié ne se faisaient pas globalement et en même temps, les orfèvres se sont donné la liberté de prêter au delà de la quantité du métal reçu en émettant des récépissés comme les banques le font aujourd´hui aux souscripteurs de crédits.


En 1694 est née la Banque d´Angleterre (BA) dans le but de permettre au roi de financer son armée. L´institution était privée et fonctionnait comme les orfèvreries de l´époque. La BA ne se distinguait de ces dernières que par les billets qu´elle émettait à la place des récépissés. Du fait de leur estampille (sceau de l´état), ces billets conféraient beaucoup plus de sécurité à leurs détenteurs qui étaient de plus en plus nombreux à en posséder. Mais il n´y a rien que le roi ou l´Etat pouvait rembourser par ses dépenses inestimables. La BA continuait à émettre des billets non couverts par le métal tout en gardant théoriquement leur convertibilité en or. Cela n´a pas manqué de créer régulièrement des hausses de prix et de rabaisser la valeur des billets (inflation). Et c´est en vain que leurs détenteurs ont voulu se réapproprier leur métal. Le 03 Mai 1797, le gouvernement interdit à la Banque d´effectuer toute conversion de billets jusqu´au 24 Juin. C´est à partir de cet événement marquant (Bank Restriction Act) que le cours forcé du billet de banque a commencé. Depuis lors, le billet s´est revêtu du caractère fiduciaire qu´on lui connaît aujourd´hui ; on ne peut le refuser parce qu´il est délivré par une autorité suprême. Pour en fabriquer, plus besoin de tenir compte de la contrepartie métallique qui jadis les garantissait. Cette subtilité est la plus grande découverte qui fit le succès de la Révolution Industrielle et du Capitalisme au delà de la manne des richesses rapportées des colonies. Pour investir, les entrepreneurs n´avaient plus besoin de recourir à leur épargne. Il suffisait d´emprunter des billets à la banque qui en fabriquait à cet effet à partir de rien, c´est à dire, sans contrepartie métallique. C´est ainsi que la monnaie s´est vidée de sa fonction de réserve de valeurs au profit d´une nouvelle fonction : celle de catalyseur de la création de la richesse par valeur ajoutée. La Banque fabrique de l´argent, le met en circulation en le prêtant aux particuliers et aux entreprises qui le lui remboursent à vue, sans délai ou presque.
______________________
(1) Savoir nommer soi-même les objets est le début de l´intelligence. Il y a quatre points cardinaux dans le monde : le Nord, le Sud, l´Est et l´Ouest. En s´appelant Occidentaux (de la Russie en Amérique), les Européens n´ont tenu compte que de deux pôles : l´Est (Asie) et l´Ouest. A cette époque "des lumières" ou même avant (opposition Rome - Constantinople), l´Afrique ne comptait pas dans l´humanité, du moins dans la pensée européenne. Les expressions Nord Sud pour distinguer les pays industrialisés de ceux qui ne le sont pas ne datent pas d´il y a longtemps. Le terme approprié pour désigner le pôle géographique qui va de la Russie en Amérique est Nord-Ouest.

(2) Sur ce point l´Afrique de l´Ouest était largement en avance puisque le Cauri (ou Kori) qui a connu la subtilité des changes flottants – chose que le monde capitaliste n´a connu qu´au XXè siècle chrétien -, était une monnaie qui a surtout pallié à l´insuffisance de l´or.

(3) Ecrire Esclavage avec un "E" majuscule revient à particulariser la réalité de l´esclavage subi par nos ancêtres. Un événement sans précédent par son envergure et sa cruauté.


3 - LA MONNAIE, UN BIEN VIDE :


La monnaie est une créance à vue sur le système bancaire à cause du caractère vide dont elle revêt à sa création. Elle se comporte comme une boîte vide dont l´utilité est de permettre la production d´un bien ou d´un service dont la commercialisation doit permettre le remplissage de la boîte.

Pour clarifier ce qui a été exposé au chapitre précédent, rappelons les trois fonctions traditionnelles de la monnaie :
Permettre ou faciliter le calcul économique (la monnaie est une unité de compte). Exemples : 1$ = 1$, 45 kilogrammes de riz = 29$, 10 stylos = 7$, 1 pain = 0,8$, etc. Cela veut dire que pour avoir 1$, il faut compter 1$, et pour avoir 10 stylos il faut compter 7$. Ici le $ (le numéraire) c´est l´objet de référence (le bien-étalon) à partir duquel les autres objets sont évalués. c´est la monnaie. Cet objet étalon pourrait être du métal, un objet quelconque, voire même un objet immatériel comme le Shat en Egypte Antique.
Permettre de garder des objets (périssables ou non) en valeurs c´est-à-dire en objets impérissables, divisibles et reconnus de valeur. La monnaie est une réserve de valeurs pour cette raison. Exemple : 4 tonnes de tomates = 25 décagrammes d´or = 1voiture = 8000 € = garantie pour racheter les 4 tonnes de tomates à la prochaine saison (si bien sûr le prix reste le même).
Permettre l´interchangeabilité des objets. Pour cette troisième fonction, la monnaie constitue un moyen de paiement ou un intermédiaire d´échanges. Ex : 20kg de tomates = 1 chemise = 40 €. Au lieu de troquer ma chemise contre 20kg de tomates, je débourse 40€ si j´en ai. Ici pour le cas du Shat, le prix serait connu (40 Shats par exemple) mais pour me procurer les 20kg de tomates, je cèderais inévitablement ma chemise (troc).


Nous avons vu que la monnaie a perdu sa fonction de réserves de valeurs, non seulement parce que les 4 tonnes de tomates ne valent toujours pas 8000 € mais parce que, le véritable objet de réserves, le métal ou l´or a cessé d´être l´objet effectif d´évaluation. En effet si nous remontons le temps, nous voyons que pour acheter les 4 tonnes de tomate il y avait obligation pour un commerçant par exemple d´avoir 250 grammes d´or en espèces ou sous forme de récépissé et le récépissé venait – nous l´avons vu – d´un stock d´or réel en réserve. Chaque récépissé ou chaque billet était garanti par la quantité d´or qu´ils représentaient. Chez l´orfèvre, le commerçant pouvait se faire prêter les 250g d´or s´il n´en avait pas lui-même. Mais il est arrivé à partir d´une certaine époque la situation où l´orfèvre n´avait plus une pépite à prêter. Avide de l´intérêt que lui rapportaient les prêts, il entreprit de donner des récépissés non garantis à ses débiteurs. Il pouvait le faire à volonté mais dans la limite des spéculations de ses rentes. Le commerçant pouvait donc se contenter d´un simple récépissé ou billet à la place des 250g d´or et pouvoir s´acheter les 4 tonnes de tomates. Ni lui ni son vendeur de tomates ne se doutaient que le papier ne fusse pas garanti, seul l´orfèvre le savait. Toutefois il était tenu de rembourser son créancier en monnaie courante (or) ou même en récépissés émis par d´autres orfèvres ; et le vendeur de tomates qui recevait le récépissé pouvait à tout moment le convertir en or chez son émetteur (l´orfèvre de son acheteur). Les conflits ont commencé lorsque l´orfèvre n´avait plus la possibilité de faire cette conversion. D´où l´événement du 3 Mai 1797 provoqué essentiellement par la BA qui n´était plus solvable face aux détenteurs de billets qu´elle avait elle-même fabriqués.

Cette situation s´est généralisée et les billets ont pallié à l´insuffisance de l´or ; et cela afin de répondre aux besoins de l´Economie qui veulent que la possession de la monnaie précède les dépenses d´investissement en vue de créer de la richesse, de la valeur ajoutée par la production. Si nous reconsidérons notre commerçant dans le contexte actuel où l´or n´est plus une monnaie d´échange, à la place de 250g d´or, la banque lui prêterait 8000 € de manière quasiment fictive en mettant juste un chéquier à sa disposition. Sans tenir compte de la moindre réserve d´or ; comme l´aurait fait l´orfèvre en lui donnant juste un récépissé. Cette quasi délinquance en matière monétaire se révèle salutaire dans ce sens que l´économie souffrirait de ne pas voir le commerçant se procurer ses 4 tonnes de tomates pour les revendre à cause de l´insuffisance de monnaie en banque. En absence de crédit, l´Economie ne peut pas s´épanouir.


La création de la monnaie se fait donc dans le but d´investir et non uniquement en fonction du métal ou des réserves extérieures (devises) qu´une banque (centrale ou commerciale) peut avoir à son actif (en stock). C´est en cela que la monnaie est un bien vide, parce que fabriquée à partir de la seule garantie du retour d´investissement. On voit là qu´en battant de la monnaie, sous quelque forme qu´elle soit (fiduciaire, scripturale, etc.), on déclenche automatiquement le phénomène viral de l´inflation. Phénomène qu´on peut comprendre comme l´épanchement d´un flux trop important dans un vaisseau lorsque le vaisseau n´arrive pas à s´adapter au flux, c´est-à-dire lorsque le but pour lequel la monnaie est créée n´est pas atteint. On dit en ce moment là que la monnaie n´est pas remplie. Cette quasi inconditionnalité qui prévaut à la fabrication de la monnaie dans les économies modernes montre bien que la monnaie est une créance à vue sur le système bancaire, c´est à dire, "un droit de remboursement sur le système bancaire." En d´autres termes, il faut de la monnaie d´abord pour investir, contrairement aux idées ringardes et mensongères qui font de l´investissement, la charrue de l´épargne. Ce qui se passe c´est qu´on fabrique d´abord de la monnaie, on l´injecte dans l´économie au travers des investissements et on fait signer des reconnaissances de dette à ceux qui reçoivent cette manne monétaire.


La monnaie, un bien vide qu´il faut remplir :


L´investissement peut venir du marché financier (bourse), des intermédiaires financiers non bancaires (assurances, sociétés de crédit, etc.) ou de la banque. Quand il vient de la banque (commerciale en l´occurrence), celle-ci crée de la monnaie (scripturale à travers le chéquier) qu´elle met à la disposition de son client moyennant un intérêt I1. Si la banque n´est pas liquide pour faire face aux besoins de l´investissement, elle emprunte à la Banque Centrale qui va lui fabriquer la somme requise moyennant un intérêt I2 inférieur à I1. Cette somme (S0) va augmenter la quantité de monnaie (M) en circulation dans l´économie pendant la période d´amortissement (M+S0). Pour éviter que l´inflation générée dégrade la situation économique, il faut veiller à ce que l´investissement de S0 produise de la valeur ajoutée et que (1+I2)S0 et (1+I1)S0 ne se réduisent pas à de simples spéculations pour l´actif des deux banques qui sont déjà débiteurs de S0 (Banque Centrale) et (1+I2)S0 (banque commerciale).


En fabricant S0, la BC spécule sur le fait que S0 puisse être le prix P0 des produits de l´investissement pour lequel S0 est créé, en vue de retrouver l´équilibre initial M=P c´est-à-dire M+S0=P+P0. M étant la quantité totale de monnaie en circulation et P, le prix total de tous les produits du marché (biens et services). Lorsque cet objectif est atteint, l´inflation s´éponge par l´arrivée des nouveaux produits sur le marché (S0<=P0). En effet pour amortir l´investissement, il suffit que les produits de cet investissement aient un prix total égal au Prix de Revient (PR=(1+I1)S0). Ainsi donc si avant l´investissement nous avons P=M, pendant la période d´amortissement nous avons P

En général lorsque les nouveaux produits sont bien appréciés sur le marché, la production augmente P de P1>P0 et on se retrouve avec P>M (P=P+P1). Cette situation où la monnaie se surévalue du fait de sa rareté est dite déflationniste car la richesse du pays (P) dépasse de P1 son évaluation en terme de quantité de monnaie (M). C´est ce phénomène qui a conduit à la crise de 1929 (pages 50, 54). En effet après la Première Guerre Mondiale Moderne, presque tous les pays ont décidé la non-convertibilité or de leur monnaie (5), ce qui a poussé les banques centrales à fabriquer de la monnaie de manière démesurée (M>>P) – car ne tenant plus compte de la quantité des réserves à leur actif. L´inflation était tellement grande qu´en 1929 on a décidé de renverser la tendance, mais malheureusement brutalement. Et Wall Street s´est effondré.


Lors d´une déflation (M
En temps normal (sans inflation ni déflation), M doit toujours être sensiblement égal à P, prix total de tous les produits du marché (biens et services). Il y a inflation lorsque M augmente sans que la production ne suive cette augmentation, c´est-à-dire, lorsque la valeur totale de tous les produits n´atteint pas M (P

La production de la monnaie ne suit qu´une logique, celle du crédit à la production. Le monde capitalisme n´aurait pas connu un si grand succès si on obligeait les entrepreneurs à financer eux-mêmes leurs projets. Dans un tel système, on ne se préoccupe pas de l´augmentation de M dès lors qu´on a la garantie de produire toujours plus, qu´on ait du métal ou des devises en réserve ou pas. Seul compte, pour garantir une monnaie, le rapport de sécurité M/P permettant d´apprécier la qualité de la politique monétaire. A ce jour les Etats Africains ou une grande partie d´entre eux ne semblent pas avoir compris cette subtilité libératoire, "fondamentale dans l´assimilation du fait monétaire et de son rôle social."


Problème de l´assimilation du fait monétaire en Afrique :


La plupart des monnaies africaines ne sont pas au service de leur économie nationale ou régionale. Les investissements locaux sont quasi inexistants pour la simple raison que la charrue est mise avant les bœufs dans l´octroi des crédits ; trop de foi étant mise dans les investissements extérieurs. Comprendre que la monnaie est une créance à vue sur le système bancaire, c´est comprendre que tant que les crédits ne sont pas faits, il ne peut y avoir ni investissement, ni création de la richesse. Ce qui explique la mendicité de nos Etats qui, même pour faire face à la masse salariale, sont obligés de pratiquer la politique de la main tendue. Ne réalisant pas que les prêts qu´ils obtiennent des pays du Nord ne sont que de l´argent vide, non budgétisé. Ce qui est une aubaine pour ces pays prêteurs pour lesquels nos pays produisent de la richesse après remplissage de leurs prêts vides. La situation est la même que celle décrite plus haut. En nous faisant des crédits, ou comme ils aiment le dire, en nous donnant des Aides Publiques au Développement (APD), ils nous incluent dans leur système économique qui se trouve élargi pour résorber leur inflation. Le notre est réprimé et travaille pour le leur. C´est pour cela que l´indépendance économique nous est refusée. A la BEAC, à la BCEAO ou à la Banque Centrale des Comores (BCC), les Français président au conseil d´administration, et tout est décidé par eux en dernier ressort (7). Les richissimes hauts fonctionnaires africains qui y travaillent ne sont que des sous-fifres dont la foi en l´expertise de leurs "collègues" français est sans faille. Pour eux, seuls les investissements extérieurs comptent pour développer l´Afrique. Et le colon veille à ce que tout le monde soit soumis aux règlements en vigueur. Les idées nouvelles n´y rentrent pas.

Aux indépendances, le colon a joué la carte de la reconquête, son intelligence lui a suggéré q´"on ne conquiert pas que par les armes." ( Le génocide perpétré par cette répression est indicible. Il dure plus de quarante ans et alors que nous nous apprêtons à fêter notre demi-siècle d´indépendance, nos économies sont toujours aux mains des anciennes puissances coloniales et la Monnaie, l´élément central qui leur permet de s´épanouir échappe à notre compréhension. Ce qui fait que pour beaucoup d´intellectuels africains – même assez éclairés soient-ils (9) - il n´est pas question de remettre en cause l´existence du FCFA (Franc des Colonies Françaises d´Afrique déguisé en Franc de la Communauté Financière d´Afrique) qui présente "l´avantage" d´être "stable", "transférable" et "convertible" en Euro. Là est la grande arnaque faite aux Pays Africains de la Zone Franc (PAZF) :


a)- Le Franc CFA doit sa fragile et coûteuse stabilité à sa subordination au Franc Français (aujourd´hui l´Euro) auquel il est arrimé. Chaque PAZF a un compte d´opérations au Trésor Public français où ses réserves sont stockées comme dans un compte courant avec droit de découvert. Au nom de cette "stabilité", 65% de nos réserves extérieures (devises) y transitent comme un placement pour servir l´économie française au détriment de la notre. Les dévaluations du FCFA interviennent lorsque les comptes d´opérations présentent un bilan globalement négatif par suite de l´endettement excessif. Pour nous convaincre davantage de garder cette subordination, on ne cesse de nous marteler, tant par la France que par nos intellectuels bornés, que nos économies sont tellement faibles que nous ne pouvons gérer nous-mêmes nos monnaies de manière souveraine.


b)- La libre transférabilité du Franc CFA en France (ou dans toute la zone Euro) et ce, de façon illimitée nuit considérablement à l´équilibre de la Balance des Paiements (BDP) dans les PAZF où généralement les Balances Commerciales sont toujours positives. Les investissements étrangers se révèlent être des siphons d´échappement de la masse monétaire car les énormes profits réalisés dans les PAZF sont systématiquement rapatriés. Ce qui rend inutiles ces investissements quand bien même ils créent de l´emploi. Une monnaie protégée (non transférable et non convertible comme la Roupie indienne) ne peut permettre cela.


c)- La convertibilité du Franc CFA, ajoutée à la fixité de sa parité avec le Franc Français (ou l´Euro) constitue un leurre pour le développement de nos économies et une aubaine pour les détournements de fonds et la fuite des capitaux qu´elle favorise. L´argument souvent avancé pour cacher la forêt du désastre économique que cette convertibilité crée est de dire que celle-ci est source d´attraction des investissements étrangers. Pourtant depuis la création de la Zone Franc, l´Afrique reste le continent qui attire le moins les capitaux étrangers. Aussi longtemps que les Africains croiront au salut par les investissements étrangers et l´expertise étrangère, l´Afrique continuera de subir les mécanismes de paupérisation.

Pour être effective, l´indépendance des pays africains passe par une totale indépendance économique et celle-ci est impossible sans le contrôle intégral des instruments de la souveraineté étatique dont la Monnaie constitue l´élément central qui permet tout épanouissement. Un foyer digne de ce nom peut-il confier sa propre gestion à un autre foyer ? Peut-il accepter d´être géré par un autre ?


Comment expliquer l´endettement excessif de certains pays industrialisés ?

Cela peut paraître paradoxal de savoir que certains pays capitalistes sont excessivement endentés alors qu´ils maîtrisent les subtilités de la réussite économique en plus des prébendes qu´ils entretiennent dans les pays du Sud. La raison principale en est que ces pays vivent largement au dessus de leurs moyens à cause des charges sociales et des gigantesques projets qu´ils ne peuvent s´empêcher de financer. Dans tous les pays dignes de ce nom, la Banque Centrale (BC) est une institution étatique dont le rôle est d´élaborer la politique économique en adéquation avec le gouvernement. Elle bat la monnaie et fait des crédits non remboursables à l´Etat en veillant à ne pas déborder le vase. Cet endettement inflationniste est nécessaire pour l´économie nationale lorsqu´il est suivi par la croissance. Mais l´Etat n´y fait souvent recours qu´en cas de déficit budgétaire lorsque les dépenses publiques dépassent les entrées budgétées du Trésor Public. Face à cette situation, il peut arriver que pour éviter l´engorgement de l´économie et préserver l´équilibre M/P de la stabilité de la monnaie, la BC demande au gouvernement de s´approvisionner autrement. D´où le recours à l´endettement extérieur, par emprunt de devises ou par non règlement immédiat des importations ou des services reçus des autres pays (10). Et à mesure que cette situation se répète, l´endettement peut croître de manière exponentielle.


(4) A titre d´exemple, les choses se passent comme si on vous prêtait 1000 € pour faire du commerce. Avant le prêt, vous n´avez rien si ce n´est votre projet ; les 1000€ sont (de la monnaie) pour vous, un bien vide, qui ne vous appartient pas, qui sort du néant en quelque sorte et qu´il faut coûte que coûte remplir (rembourser) si vous ne voulez pas vous retrouver avec une corde au cou. Quand vous aurez réussi à rembourser les 1000€ avec l´intérêt qui va avec, vous aurez produit une richesse par la valeur ajoutée (aux 1000€, - au minimum l´intérêt 1000 x I1) et vous vous retrouvez avec quelque chose à votre actif alors qu´avant le prêt vous n´aviez rien.


(5) Avant cette date, il était possible d´échanger des billets contre de l´or dans les banques. Aux USA, cela a continué jusqu´au 15 août 1971.


(6) Le FMI utilise souvent cette méthode pour réprimer l´Afrique : Programmes d´Ajustement Structurel (PAS), contrôles budgétaires, sanctions sur les déficits budgétaires, réduction des dépenses publiques, etc. A prime abord ça n´apparaît pas comme un mal ; pour nos spécialistes bornés c´est d´ailleurs un ensemble de mesures de bonne gouvernance. L´Afrique ne sortira jamais de l´auberge avec cette élite impensante.


(7) Lire Nicolas AGBOHOU : "Le Franc CFA et l´Euro contre l´Afrique"

( Après l´échec de l´armée française dans le renversement du pouvoir ivoirien en novembre 2004, la France s´est consolée en menaçant de geler les avoirs extérieurs de la Côte d´Ivoire. Il ne s´agissait pas là des possessions de Laurent GBAGBO mais bel et bien des réserves de la Côte d´Ivoire qui se trouvent dans un "Compte d´Opérations" au Trésor Public français. Faut-il encore rappeler que le Franc CFA est une monnaie intégralement gérée par la France pour empêcher toute expansion économique en Afrique ?


(9) En 1996, dans son livre : " Gouvernance et politique monétaire. A qui profitent les banques centrales de la zone franc ?" (Editions l´Harmattan), le Pr Tchétché NGUESSAN, agrégé d´économie, anciennement économiste au FMI, face à l´avènement de l´Euro, préconisait parmi cinq scénarios celui du statu quo en promouvant la bonne gouvernance qui conduirait à la création d´une monnaie africaine souveraine avec la caution de "nos partenaires".


(10) Nicolas SARKOZY, ministre français de l´Economie en 2004, a lui, opté pour la vente d´une partie des réserves en or de la Banque de France au lieu d´endetter le pays davantage.


4 - AFRIQUE : LA REPRESSION MONETAIRE :


5 – ORGANISER LA RESISTANCE COMMUNE :

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Le travail que nous allons faire aujourd´hui devra être gravé à tout jamais dans le cœur de nos enfants, afin qu´ils connaissent et maîtrisent parfaitement les coutumes de chez nous, afin que nul n´oublie ces deux héros...

"Mongo Beti parle", testament d´un esprit rebelle: entretiens avec Ambroise Kom
Le patron se lève le matin, on lui montre le porc-épic qu`on va lui préparer pendant qu`il mange son petit déjeuner. Après, il joue au songo, il boit, il joue au songo, il boit. A midi, il se bourre de viande comme Louis XIV. Il a un régime dégueulas...

Innovations sociales et renaissance de l´Afrique Noire
Jean-Marc ELA a publié de nombreux ouvrages. Il a longtemps enseigné à l`Université de Yaoundé (Cameroun) et comme professeur invité à l`Université catholique de Louvain-La-Neuve (Belgique). En 1997, il a été le directeur de l`Institut du CODESRIA su...

de DOUALA à DOUALA
Recueil et Extraits de quelques références Bibliographiques
© douala-net.info...

"The United Independent Compensatory Code: A Text Book/Work Book for Victims of Racism/White Supremacy. (1969)". "The Code." Neely Fuller Jr.
"If you do not understand White Supremacy (Racism)-what it is, and how it works-everything else that you understand will only confuse you". Neely Fuller Jr....

The Isis Papers: The Keys to the Colors
... the first global power system of mass oppression is the power system of racism (white supremacy). Once the collective victim (non-white population) understands this fundamental issue, the ultimate organizing of all of the appropriate behaviors ne...

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Jumeaux Masao "Ngondo"

Remember Moamar Kadhafi

LIVING CHAINS OF COLONISATION






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