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14.10.2009

Increvable Sarah Kala Lobe Kuta 

PIONNIÈRE D’UNE CERTAINE ÉDUCATION POUR LA PETITE ENFANCE, L’OCTOGÉNAIRE EST ÉGALEMENT SOUCIEUSE DU SORT RESERVÉ AUX PERSONNES ÂGÉES DANS NOTRE SOCIÉTÉ AUJOURD’HUI.

Connaissez-vous l’expression «être d’une pâte à vivre cent ans» ? La locution signifie que la personne dont on parle a la constitution ou le tempérament pour atteindre cet âge-là. Sarah Kala Lobe Kuta par exemple. Solide et bon pied bon œil, elle avance, l’air sévère. Faisant perdre ses moyens au reporter qui se demande s’il doit lui parler en la regardant ou en baissant la tête. On ne lève pas les yeux sur 82 années pimpantes comme ça. «Nous venons pour faire un portrait de vous». Ce n’est pas avec ça qu’on va l’impressionner. Il y a même à parier qu’elle sourit de voir le jeune homme bredouiller et ânonner. Ouf !

Il faut en effet savoir se tenir. Sarah Kala Lobe Kuta ne badine pas avec l’éducation. Le cheval de batille d’une vie. Tout commencerait et se terminerait avec. «L’éducation, c’est l’imitation», croit-elle d’ailleurs. Voilà plusieurs années qu’elle attire l’attention de l’opinion sur le sort des personnes âgées dans notre pays, créant associations et animant manifestations. Le 1er octobre dernier, à la faveur de la journée internationale des personnes âgées, la Mutuelle des personnes âgées du Cameroun (Mupac) a organisé une série d’événements dont des journées santé, des conférences débats, des concours miss et masters du troisième âge.
Présidente de la Mupac dont elle est à l’origine de la création, Sarah Kala Lobe Kuta aime à rappeler que la mutuelle vise concrètement à négocier la prise en charge des besoins de santé de ses membres auprès des structures hospitalières, la formation des encadreurs pour personnes âgées et la défense de leurs intérêts moraux et matériels. Affiliée à la Fiapa, la Fédération internationale des associations des personnes âgées, la Mupac est une autre initiative de Sarah Kala Lobe Kuta au bénéfice des personnes âgées. Elle y avait déjà affilié l’association «Camaraderie», créée en 1950 et aujourd’hui connue sous l’appellation officielle Organisation pour l’éducation et la protection de l’enfance africaine (Oepea). Ses membres, jeunes femmes à l’époque, sont à présent grands-mères et arrières grands-mères. Ce qui n’empêche pas Sarah de continuer de mener une riche activité associative.

L’éducation avant l’instruction

De la même manière, depuis des décennies, la pédagogue s’occupe de la petite enfance. Sarah Kala Lobe Kuta ne tolère pas qu’un jeune soit assis alors qu’un aîné est debout. Elle ne comprend pas qu’un jeune fixe un aîné du regard. Elle ne supporte pas qu’un jeune interrompe un aîné qui parle. Ils manquent tous d’éducation. Pour la simple et bonne raison, soutient-elle, «que notre système a privilégié l’instruction, le savoir livresque, les diplômes, des diplômes que l’on achète au demeurant désormais. Tout cela au profit de l’éducation. Je préfère un homme éduqué à un homme instruit. Un homme éduqué peut s’instruire. Un homme instruit ne peut pas s’éduquer parce qu’il a la prétention de savoir».

C’est pourquoi, forte d’une longue expérience et bardée de parchemins qu’elle ne mentionne pas, madame Kala Lobe est revenue au Cameroun à la fin des années 70 pour se mettre au service du pays. A l’époque, le pays n’a pas un seul spécialiste des écoles maternelles. Inspectrice d’école maternelle dans l’Hexagone, elle accepte et commence à travailler. Le chantier est vaste. Les jardins d’enfants pullulent que l’on considère comme des écoles primaires en miniature avec ces tables bancs trop grands sur lesquels les deux-trois ans ne peuvent s’asseoir convenablement. Confiés à des jardinières et des puéricultrices qui, même si elles sont des éducatrices, ne sont pas des pédagogues.

Même si les méthodes qu’elle préconise ne sont pas toutes adoptées, Sarah Kala Lobe Kuta oeuvre jusqu’au bout. Tant et si bien que le ministre René Zé Nguele retarde son départ à la retraite pour besoins de service. En échange, elle obtient l’autorisation d’ouvrir du centre socio-éducatif «Les enfants de maman Nono», une école maternelle, laboratoire vivant des réformes préconisées. Sa retraite, elle ne l’a en réalité jamais prise. A bientôt 83 ans, elle est toujours par monts et par vaux. «Ce sont mes enfants qui s’inquiètent pour moi», s’amuse-t-elle. Pour, plus sérieusement, avancer «qu’un être normalement constitué, même dans son lit de malade, a toujours quelque chose à transmettre».

Turbulente et rebelle

Et c’est vrai que la maman de Suzanne, comme on l’appelle à Douala, a des tonnes et des tonnes de choses à transmettre. Ou lala ! Si vous l’entendez raconter son enfance dans les années 30, sa jeunesse, sa vie de femme… De quoi écrire un livre sur une existence pleine et passionnante. Sarah Kuta est née le 11 mars 1927 à Douala d’un père malimba de Mouanko en Sanaga maritime. A l’âge de sept ans, elle est choyée par son grand père paternel qui l’a prise avec lui à Edéa. Elle risque de finir enfant gâtée et est bientôt remise à sa grand-mère maternelle, une des veuves du roi Bell. Dans cette cour royale de Douala, les classes d’âge vont de sept en sept ans.
Dès 7 ans donc, les jeunes filles sont confiées aux femmes qui s’occupent de leur éducation : les champs, la cuisine, la maison, etc. Au même moment, les garçons, eux, ne touchent à rien ou presque. «Ça m’énervait, se souvient-elle encore. Moi, je devais faire la cuisine pour mon cousin germain et laver la vaisselle après. Quand ma grand-mère n’était pas là, je l’obligeais à le faire. S’il refusait, je le tabassais». Une vraie frustration naît de cette différenciation. Plutôt turbulente, Sarah aime à se battre avec les garçons et n’accepte déjà pas qu’un homme lui marche sur les pieds, «qu’il me commande, à moins que ce ne soit mon père».

Quand il faudra aller à l’école, Sarah traîne les pieds. A cette époque, coloniale bien entendu, pour être retenu, il fallait toucher son oreille gauche avec sa main droite. Facile pour ceux qui ne voulaient pas s’asseoir sur les bancs. Sarah se payera le luxe de deux ans d’école buissonnière. Elle préférait jouer et sucer les cannes à sucre. Ses oncles s’en aperçoivent et ordonnent aux garçons de Bali de la porter chaque matin sur leurs épaules pour la déposer directement dans sa classe. Prise au piège, Sarah n’a pas le choix. Elle est désormais assidue et obtient son certificat. Admise à l’école supérieure des jeunes filles de New Bell, elle rêve d’être sage femme. Dans son entendement d’alors, «une sage femme est une femme docteur blanche qui opère». Une chirurgienne donc.

L’un de ses enseignants, Jean Puig, a fort à faire avec cette élève résolument rebelle. Pour lui, elle est faite pour enseigner. Mais lorsque en 1946, Sarah prend le chemin de l’école de Dakar, elle a sa petite idée en tête. Alors qu’elle est destinée à l’Ecole normale des institutrices de Rufisque, elle guette l’Ecole des sages femmes de Dakar. Elle y arrive effectivement avec les Niat Julienne, Isola Marie Bikoï et autres Yvette Naemi Eteki Mboumoua. La première visite des maternités la dégoûte. Les filles de Première année doivent nettoyer partout où les femmes accouchent. Ah non ! Pas la fille de Kuta. Ce sera Rufisque.

Accusée de sympathie pour l’Upc

Revenue au pays à l’issue des deux ans d’études, elle doit prendre le chemin de la France pour l’Ecole normale du Bourget. Et là encore, Sarah se braque. C’est que le responsable fait du chantage aux filles, un certain droit de cuissage, et empêche la jeune femme d’être du voyage, lui lançant au passage «est-ce que vous dépassez vos amies qui ont cédé». Imperturbable, elle lui répond «c’est elles qui me dépassent». Surréaliste : un rapport l’accable : elle fait de la politique et sympathise avec l’Upc de Ruben Um Nyobe. Son nom est remplacé. Sarah demande simplement son recrutement et est affectée à Dschang le 5 mars 1948.
A la suite d’un grave accident de la circulation, le père Kuta est gravement blessé et reçoit la visite d’un proche, un Mandessi Bell, flanqué de son neveu, Iwiyé Kala Lobe, étudiant en journalisme «o mbengue bakala», en France. Sarah est aussi là et tape dans l’œil du vacancier. Alors qu’on lui conseille simplement de la prendre « pour sa couche», le gars n’a qu’une seule idée en tête, l’épouser. Sarah qui en déjà éconduit quelques uns se marie civilement avec monsieur Kala Lobe le 5 mars 1949, et religieusement, le 19 mars suivant. Ils eurent beaucoup d’enfants.

Sarah Kala Lobe Kuta est affectée à Douala cette fois alors que son époux, rentré au pays entre-temps, travaille pour L’Eveil du Cameroun, La Presse du Cameroun, etc. Avec la diaspora noire, il a aidé à mettre sur pied la maison d’édition Présence africaine et doit repartir en France en 1961. Nommé secrétaire administratif de la Société africaine de culture. La famille le suit bientôt. Même si elle avait déjà été en France plus tôt, Sarah se souvient quand même avoir vécu un choc. « Toute cette grisaille, ces immeubles gris, ces personnes âgées que je voyais ployer sous le poids de leur cabas. N’avaient-ils pas de famille ? Et tous ces gens qui se rencontraient sans se saluer… »

Dans cet environnement, cette mère africaine ne craint pas pour l’éducation de ses enfants. «Je me suis dit que tout ce que je n’ai pas voulu que l’on me fasse quand j’étais enfant, je ne le ferai pas à mes enfants. Je n’ai pas eu de problèmes éducatifs avec eux. J’ai pris l’option de leur parler ma langue maternelle. Je leur ai inculqué des valeurs de respect et de droit d’aînesse. Suzanne parle comme elle parle mais si son grand frère s’exprime devant elle, elle l’écoute.» Ce n’était pas une éducation dictatoriale, on discute de tout et Sarah a toujours fait une recommandation aux siens: « Ce que vous faites de mal, dites-le moi. Je vais peut-être vous gifler, mais cette gifle vaut mieux que de me le cacher, ce qui aura peut-être des conséquences fâcheuses pour la famille ou la société. Du coup, mes enfants ne m’ont jamais menti.» A présent, qui vous savez à de qui tenir, non ?

Cv

11 mars 1927 : naissance à Douala.
5 mars 1949 : la corde au cou ou mariage avec Iwiyé Kala Lobe.
1943 : certificat d’études primaires, «je suis un homme maintenant puisque les études étaient réservées aux hommes».
1973 : naissance de ma première petite-fille.
1986 : création du centre socio-éducatif «Les enfants de maman Nono».
2005 : naissance de mon premier arrière petit-fils.

Ce que j’aime : la vérité, la loyauté, l’humilité, que l’on me critique plutôt que l’on me loue.

Ce que je n’aime pas : l’hypocrisie, oh la la !
Mes amis : tout le monde est mon ami (e). Je ne voudrais pas avoir d’ennemi. Même mon ennemi est mon ami.

Mes musiques : tout ce qui est culturel et traditionnel et pas vos criaillements de jeunes. J’aime aussi le classique et le jazz qui disent quelque chose.

Mes acteurs : Jean Gabin, Martine Carole, Danielle Darieux, Yul Brenner, John Travolta.

Mes livres : toute la littérature y compris les livres ésotériques, les sciences occultes, je lis de tout.



Impressions
GEORGETTE KALA LOBE STRUBEL, SA FILLE JUMELLE, DANSEUSE CHORÉGRAPHE : «IL LUI FAUDRAIT DEUX VIES»

Maman a toujours mené son petit monde familial à la baguette. Sous son kaba, elle portait la culotte, un rôle qui lui allait bien à coté d´Ywié Kala Lobé, mon romantique et blueseux papa. Aussi, nous la craignions et bien sûr, mes frères et soeurs acceptaient sans rechigner sa volonté et son autorité héritée de longue lignée d´austères protestants. Jamais elle n´a levé la main sur moi. Sa parole forte et définitive suffisait. Petite fille, je l´admirais, je la trouvais belle et exemplaire de courage. A un certain âge, elle a repris ses études en se battant pour la survie et surtout la dignité de sa petite tribu. Maintenant, elle a l´âge du bilan, beaucoup connaissent ses engagements et la création de son école, l´oeuvre de sa vie. Pourtant, cette combattante n´en n´a pas fini avec elle-même. Je la sens inquiète, insatisfaite comme s´il lui faudrait deux vies pour parfaire sa tâche. A mes 15 ans, j´ai rejeté l´école en France, c´est-à-dire que j´ai contesté l´autorité de maman. Mon seul désir a été de devenir danseuse et, croyez-le ou pas, mon autoritaire maman a digéré le coup et s´est remise en question. Elle a cherché pour moi une école de danse, m´a inscrite à l´Académie internationale de la danse de madame Nicole Chirpaz. Au bout de trois mois, ma mère est venue rencontrer Nicole Chirpaz pour s´enquérir de mon fonctionnement. J’étais plutôt douée. Depuis, ma carrière continue à s´égrener. Maman contemple cela de loin, avec une certaine fierté, je crois.

ME ALICE NKOM, ANCIENNE ÉLÈVE ET AVOCATE : «COURAGEUSE ET PLEINE D’ÉNERGIE»

Elle m´a enseignée à l´école primaire de New-Bell à Douala, au cours élémentaire si mes souvenirs sont exacts. Je me souviens d´un après-midi, où elle avait pris la décision de nous raccompagner à la maison alors que Nkongmondo, siège de l´UPC, et, forcément, repaire des maquisards comme on les appelait à l´époque, était à feu et à sang. Il était hors de question que les parents bougent pour aller chercher leurs enfants à l´école dans ces conditions. Il était également inimaginable pour la mère et l´éducatrice responsable qu´était madame Kala d´abandonner à l´école, ses élèves, -que dis-je, ses enfants, notamment ceux qui habitaient à Nkongmondo, -et de rentrer tranquillement chez elle en toute sécurité en évitant ce quartier dangereux. Madame Kala a pris son courage à deux mains, et a conduit, à pieds, tous ceux qui habitaient Nkongmondo, au risque de se faire tuer comme cela est arrivé à de nombreuses personnes dont on pouvait d´ailleurs voir les têtes accrochées à des piquets ! Je ne suis pas surprise de la voir aujourd’hui, increvable octogénaire, sautant d´un avion pour un autre et parcourant le monde pour dispenser son immense expérience dans les domaines aussi variés que l´éducation, le 3è âge, les femmes et bien d´autres domaines. Je l´aime beaucoup, ma Sita Sarah, comme je l´appelle aujourd´hui, si pleine d´énergie. Elle ne saura jamais à quel point elle n´a cessé de m´inspirer : je la soutiens et la remercie pour l´immense travail et l´encadrement qu´elle apporte aux enfants handicapés, aux trisomiques, et à tous les efforts qu´elle déploie pour qu´ils soient, des enfants comme tous les autres.

BERTHE EKOLLO, AMIE D’ENFANCE ET MÉNAGÈRE : «ELLE AIME VRAIMENT LES GENS»

Nous nous sommes connues dans notre enfance. Nous allions à l’école ensemble. Nous n’étions pas dans la même école mais empruntions le même chemin. C’était dans les années 1930. Nous avons été baptisées le même jour, en 1940. Après, on s’est séparées et chacune a pris son chemin. Dix ans après, je crois, on a créé un groupe d’amies qui s’appelait « camaraderie ». Pour son caractère, je sais que c’est quelqu’un qui aime les gens. Ce n’est pas parce qu’elle donne à manger ou qu’elle les aide matériellement ou financièrement. Elle aime les gens parce qu’elle a bon cœur. Si elle a quelque chose, elle voudrait que toi aussi, tu aies la même chose. C’est pour ça qu’elle nous a emmenées partout en France avec l’association « Camaraderie ». Je l’accompagne dans tous les voyages qu’elle effectue en France. Tout ça, elle aurait pu le garder pour elle-même et en jouir toute seule, sans en parler aux autres. Elle a essayé même de nous faire souscrire une assurance vie en France mais on avait estimé que nous étions déjà trop âgées. Voilà ce que je sais d’elle. Elle aime vraiment les gens. Moi je suis ici à Bonaberi, elle est à Bali mais on se voit tout le temps. J’étais encore là-bas hier.



Acquis : De grands soins pour la petite enfance
EDUCATRICE, SARAH KALA LOBE KUTA EST PIONNIÈRE DES MÉTHODES MONTESSORIENNES AU CAMEROUN.

Dans les années 70, Sarah Kala Lobe Kuta, éducatrice en France, voit de temps en temps les ministres camerounais en charge de l’Education nationale de passage à l’Unesco. Elle y travaille d’ailleurs au département des Ong. Les Ndam Njoya, Eteki Mboumoua, Mongosso et autres Bidias à Ngon sont très intéressés par le parcours de cette dame qui devrait pouvoir rendre des services à la nation. Occupée à préparer une thèse de doctorat en psycho biogénétique, elle ne répond pas tout de suite à l’invitation.
Venue au Cameroun pour trouver des échantillons pour son travail sur l’attachement de l’enfant à sa mère, elle accepte un poste d’inspectrice nationale et s’installe à Yaoundé. Elle entame un tour du pays pour connaître la réalité et découvre une catastrophe. Les maternelles sont dans un piteux état. Structures et infrastructures ne correspondent pas à l’idée que se fait cette montessorienne de l’éducation.
Maria Montessori (1870-1952), indique le Petit Larousse, est un médecin et pédagogue italien, auteure «d’une méthode destinée à favoriser le développement des enfants par la manipulation d’objets, de matériels et par le jeu et la maîtrise de soi». Il fallait tout changer comme l’avait d’ailleurs demandé le ministre Ndam Njoya. L’inspectrice s’y colle qui refait les programmes d’enseignement et de formation. Elle souhaite que chacune des sept provinces de l’époque ait une école pilote qui devrait montrer la voie du changement. Il n’en sera rien. L’idée lui vient donc de créer son propre centre. Il y a de plus en plus de petits-enfants autour d’elle et il n’est pas question qu’elle les laisse intégrer le système classique qu’elle réprouve.
Éducatrice spécialisée, elle ouvre donc «Les enfants de maman Nono» pour enfants handicapés de toutes sortes, autistes, handicapés moteurs, handicapés moteurs cérébraux. Son dernier fils fréquente l’école maternelle du centre où la méthode montessorienne est appliquée. Tous les enfants sont mis ensemble sans distinction d’âge parce que le développement biologique ne conditionne pas le développement cognitif. «Tu peux avoir un enfant de deux ans qui a le potentiel de développement cognitif d’un enfant de quatre ans. Si tu le laisses avec un enfant de deux ans, il dégénère. Et vice-versa. On recherche donc l’équilibre.»
Chaque enfant va à son rythme mais dans tous les cas, l’éducation de la petite enfance coûte cher. «L’Etat peut et doit le faire. Ouvrir une école maternelle suppose des moyens. Les personnes privées devraient se les donner à travers les parents et il faudrait que ceux-ci soient investis dans l’école et pour l’école». Sarah Kala Lobe Kuta ne dira pas un mot de plus sur son centre. A peine souffle-t-elle que des anciennes élèves lui amènent à présent leurs propres rejetons.

Libres propos

«Lorsque j’étais jeune, les personnes âgées avaient tout le respect et se respectaient. Aujourd’hui, elles n’ont pas la sécurité sociale réservée à ceux qui ont beaucoup d’argent. Ce n’est pas normal. J’ai eu à soutenir des personnes âgées. Où sont leurs enfants ? La culture de la clôture a pris le dessus avec les chiens méchants même quand il n’y en a pas. Il faut seulement que vous teniez les gens éloignés de votre maison. Ce qui m’embête, c’est que les personnes âgées, elles-mêmes, ne se respectent pas. Quand un homme qui a des petites filles de quinze ans fait la cour à une fille de quinze ans et couche avec elle, qu’est-ce que vous attendez ? Que cette fille le respecte ? Elle ne le respecte ni lui, ni ses propres parents à elle… Les personnes âgées cultivent l’hypocrisie alors que, comme les enfants en bas âge, elles sont spontanées et sincères. Quand un enfant, entre deux et quatre ans, ne veut pas vous embrasser, il vous dit non. Les personnes âgées sont comme cela mais ce n’est pas le cas autour de nous. Quand un homme politique m’apporte un million de francs Cfa pour que je le soutienne, qu’est-ce qu’il voudrait que j’en fasse ? On infantilise la personne âgée qui, elle-même, se tait de peur d’être inquiétée. Elle n’aide pas la population… J’ai été choquée de voir qu’après les événements de février 2008, les personnes âgées ont félicité le président de la République. Il fallait lui donner les bons conseils plutôt que de lui faire parler d’apprentis sorciers. Vous ne pouvez pas trouver vos enfants en train de se battre et en accuser certains tout de suite. Faites les plutôt venir pour leur demander ce qui se passe. En son âme et conscience, le président, en tant que personne âgée, doit se le reprocher.

On me demande tout le temps comment je fais pour être encore debout. Je réponds que je n’ai pas la maladie du pouvoir, de tous les pouvoirs : je veux être ceci, je veux être cela. Ça vous mine, ça vous ronge et quand votre mental n’est pas stable, votre physique subit les conséquences. Il faut observer une certaine hygiène de vie. Moi je suis par exemple une grande danseuse. Moi j’ai dansé, j’ai fait l’amour, j’ai tout fait, comme tout le monde. Ce qui nuit, c’est l’excès.

La mort de mon mari en 1991 n’a pas changé grand-chose à ma vie parce que je suis pleine d’activités. Ce qui change, c’est quand je rentre dans des moments où je ne fais rien, où je suis seule, dans ma chambre la nuit, et que je n’ai personne à qui raconter ma journée par exemple. Voilà ce qui me manque. Je ne pense pas à la mort, c’est un phénomène naturel, un processus auquel on ne peut échapper. Ce n’est pas la peine d’empoisonner son existence en se disant « je vais mourir, je vais mourir ».

Je ne peux pas humilier quelqu’un parce qu’il ne sait pas faire telle ou telle chose. Je donne l’exemple parce que le bien est difficile à acquérir. Ce qui est important pour moi, c’est d’apprendre toujours. Mon souci, de tout temps, c’est de faire irradier un peu de l’éducation que j’ai eue autour de moi. Je ne veux pas dire que je suis très éduquée, très instruite, non. Je sais une chose, c’est que je ne sais rien et je continue inlassablement à m’éduquer, à m’instruire. »

Ecrit par Stéphane Tchakam
13-10-2009
www.lejourquotidien.info
 

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