|
06.10.2006
Hommage appuyé à Eboa Lotin
Alain TCHAKOUNTE
Cameroon Tribune [13/10/2005]
Un panel s’est réuni hier à Yaoundé pour décrypter la portée de son oeuvre.
Ils appelaient cela — pompeusement — symposium. Mais on a assisté à un concert de férus d’Emmanuel Eboa Lotin à Same. A la baguette François Bingono Bingono, iconoclaste avéré, qu’assistait des panélistes assez bien trempés tels Stella Engama, Suzanne Kala Lobé, Jean-Célestin Edjangué, ou encore Tom Yom’s, l’orchestrateur de tout ce déferlement de passion. Autour d’un artiste disparu il y a huit ans dont le rire sarcastique et les paroles acides, toutefois toujours empreintes de bonhomie, ne laissaient personne indifférent. Au Centre culturel François Villon de Yaoundé, on a fait l’exégèse de l’œuvre de l’auteur de " Martina ", " Ndol’a su ", ou encore " Bessombè ", des poèmes faisant désormais partie du patrimoine musical camerounais. Eboa Lotin a inspiré toute une génération de chansonniers de notre pays. L’un d’eux, Tom Yom’s, a tenu à rendre hommage à son " père spirituel ", à cet artiste qui lui a tracé la voie (voix, aussi) artistique. " Il a été l’un des précurseurs du doublage de la voix. Dans l’utilisation de sa guitare " hawaïenne ", il inversait les cordes ", déclare l’auteur de " Pona pona ".
Eboa Lotin ne faisait pas que chanter pour nos oreilles. Mais aussi pour nos consciences, qu’il contribuait à réveiller et retourner, chaque fois, dans ses pièces musicales. Pour l’écrivain Stella Engama, Eboa Lotin était aussi un intellectuel pamphlétaire et moraliste. Car, selon elle, le poète est celui qui casse l’ordre établi. " Il affichait son indépendance. C’était un poète de l’oralité qui rechantait dans les langues bantou les cantiques des pasteurs allemands ", renchérira la chroniqueuse Suzanne Kala Lobé. Fils de pasteur lui-même, Eboa Lotin n’en était pas moins un fervent croyant. D’une sensibilité touchante, il faisait montre de modestie et d’autodérision, dignes des maîtres.
La célébration cette année, dans la première quinzaine du mois d’octobre — Eboa Lotin, né le 6 août 1942 est mort le 6 octobre 1997 — de la mémoire de cet artiste pluridimensionnel devrait être le début d’un cycle. Les organisateurs, conscients de l’impact du message de ce poète bantou, après un spectacle à Douala, organiseront un autre demain au cinéma Abbia. Avec sur le plateau, Bébé Manga, Annie Anzouer, Dinaly et TomYom’s. Ils ont aussi pensé regrouper les textes de ce parolier qui sculptait et aimait les femmes. Pour qu’ils soient certainement enseignés à la génération actuelle. Dommage qu’elle n’ait pas fait le déplacement en grand nombre.
|
|
|