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14.02.2011
Regards: La Grammaire de la Révolte
Moubarak: démissionné! Ben Ali: démissionné. Il n’a pas fallu plus de deux expériences pour que les observateurs du monde de Davos, se mettent à spéculer sur les nouveaux paradigmes de la révolution.
De France 24 à CNN, les nouveaux maitres penseurs dela révolution, s’appelaient la rue : singe particulier duquel on ne peut tirer que des références multiples ! La rue : vaste sphère éphémère, qui empile des mythes et d’idées, faisant croire à tous ceux et à toutes celles qui veulent le changement sans trop y croire qu’il suffit de la rue pour bouleverser la donne.
La rue : autre paradigme de ces 20 dernières années sur le continent, qui n’a pas pu ou su réinventer les concepts de la révolution, pour donner à l’Afrique de nouveaux possibles. Brusquement, à travers tous les médias, il aura suffi que la rue tonne, pour qu’elle ait une légitimité, un savoir-faire pour pousser les peuples à changer leurs aujourd’hui pour d’autres lendemains.
La grammaire de la révolte fait sens. Les imbrications de la gestuelle populaire obligent les observateurs à caractériser le mouvement social. Il y a ceux qui parlent de révolution. D´autres qui suspendent leurs plumes à la révolte des mots. Mais de qui s´agit-il-t-il ? Faut-il théoriser ? Caractériser ? Analyser ? Peut-on d´autres analyses en se contentant de comparaisons structurelles et parfois anecdotiques?
De nombreux intellectuels africains ont pris position en mélangeant les paradigmes et en se cantonnant dans une sorte de populisme mal inspiré (Gaston Kelman, Achille Mbembé, Célestin Monga).Prenant leurs rêves pour leurs réalités. Sans rien faire !ll leur suffisait de se féliciter de ce que la rue a fait ailleurs, pour croire que cela allait déclencher quelque chose ici... Mais ? Quelle erreur ! Certes, la rue a fait tomber Ben Ali. Elle aurait contribué à faire tomber Moubarak. Et si Paul Biya n’y prendre garde il va tomber à son tour, dans les mailles du filet de " l´inéluctable"! Comme si les changements sociaux étaient prescrits et prédestinés, en somme une logique de l’évolutionnisme de Darwin, une fiction incompréhensible.
Les regards de cette semaine ont du mal à se concentrer sur une actualité faite de soubresauts imprévisibles et indicibles ; de redites en même temps que de révisions historiques inédites. Au moment où ces Regards sont écrits, il y a deux évènements qui sont mis bout à bout comme une mise en perspective de ce qui fait la compréhension des faits sociologiques ... En effet on se demande souvent : comment cela a-t-il pu être possible ? De quels ressorts s´agit-il ? Qui sont les acteurs ? Eh bien dans l´actualité camerounaise, il y a des évènements qui sont des cas d´école. Le 11 février était déclaré la fête de la jeunesse : la ville de Douala par exemple a vibré sous les pas de nombreuses associations qui disent n’avoir rien à faire avec le Rdpc ou le Renouveau. Puis dans le même mouvement il y a eu la démission de Moubarak : celui-ci décide de remettre le pouvoir à son vice-président tandis que l’armée veille au grain. Enfin, il y a eu le discours enregistré du chef de l´Etat, qui quel que soit le lieu où il se trouve a eu tort d´enregistrer son discours en ces temps périlleux! Le contexte est au dialogue et il lui faut faire preuve malgré ses 80 ans, de sa capacité à innover, inventer d´autres possibles, bref, d´être dans l´air du temps... Il n’en fera rien et plombe dans les mots et les maux : l´inertie devient une sorte de logorrhée, une crise qui mine le système et entretient l´inertie! La syntaxe devient autre. La grammaire des mots titube sous le poids de la réalité. Les mots éclatent comme des balles. Les flèches sont décochées de part et d´autre. Paul Biya est-il déjà fatigué ? Mais au fond qui sont-ils ces jeunes ? De quoi rêvent-ils ? A quoi s’accrochent-ils ? De cela personne ne s’en préoccupe ! Les discours sont distillés avec les sempiternelles reproches et les autres justifications, mais rien ne filtre sur la société camerounaise : où en est-elle ? Qu’attend-elle ? Que pensent les jeunes de ce conservatisme hybride et ambiant ?
Les mots de la jeunesse n’arrivent plus à entraver les maux. Ils se construisent en une grammaire complexe où la syntaxe de la révolte a du mal à devenir un programme de changement. La réalité suit son cours. Et la jeunesse, qui n´est qu´un concept voire une catégorie qui représente des aspirations plusieurs visions et une étape de toute civilisation, a du mal à voir quelle est son entité. Son fondement et sa particularité historique en ce 21ième siècle.
Ah, si jeunesse savait ! S´écria le poète... Où sont les jeunes ? Qui sont les jeunes ? Que veulent-ils ? Est-on jeune parce que qu’on est dépossédé de toute responsabilité ou est-on, jeune parce qu’on a l’âge requis pour la majorité civique ? Les questions de définition fusent de partout. Le problème du Cameroun demeure. Les activistes sur tous les supports médias ont essayé de rameuter les émeutes. Ils ont essayé de faire croire qu’il y avait matière à voir.
Mais le temps passe. Et les partis politiques ont multiplié les Conférences de Presse. Comme le Sdf, le 10 février 2011. Comme Paul Biya, avec son discours à la Nation du moins à son fer de lance, le 11 février 2011. Et enfin, Comme le Manidem de Abanda Kpama : le 13 février 2011, à la veille de la fête des amoureux en Occident.
Pourtant ailleurs les mots de la révolte ont égrené une syntaxe de la contestation que d’aucuns s´accorde à réécrire comme la grammaire de la révolution. Brusquement, les paradigmes se télescopent. Les mots s´échauffent. La rue scande un ensemble de signes que seuls les analystes veulent interpréter. Mais a-t-elle vraiment le bon tempo ? Elle récite. Elle crie. Elle explose. La révolution est-elle simplement, une injonction de la rue ? La grammaire de la révolte a sa syntaxe. Elle a ses mots. Et les maux de la société ne peuvent être réduits à cette simple grammaire. Souvent quand le peuple descend dans la rue, il croit en avoir fini avec l´ordre établi. Mais a-t-i réussi à dépoussiérer l´ordre ancien qui l´enserre dans une gangue conventionnelle parfois incommensurable ? Toute la question est là ! Les effets éphémères d´un mouvement d´humeur ne sauraient suffire à signer l´acte de feu d´une révolution !
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