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 Révérend Père Meinrad Hebga


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06.04.2008

Meinrad Hebga : " Emancipation d`églises sous tutelle ou Essai sur l`ère post-missionnaire " 

Le combat homérique d`un redoutable chasseur de démons

Ainsi, Meinrad P. Hebga s`en est allé comme n`importe lequel des mortels. La majorité parmi la multitude qui escorte sa précieuse dépouille depuis son retour le dimanche 16 mars : à Douala puis à Edéa, à Saint André / Pouma -son village natal puis à Mangen, son Centre de Prière et enfin à Yaoundé même, nous semble avoir retenu pour l`essentiel de lui l`image superstitieuse et survoltée du Prêtre exorciste, redoutable chasseur de démons et, accessoirement, du grand pourfendeur des sectes genre Rose-croix et Franc-maçonnerie… Et le groupe charismatique " Ephphata ", dont l`émergence quasi magique a occupé la dernière partie de sa vie, y est pour beaucoup. De sorte que seuls quelques initiés connaissent le combat le plus homérique et le plus épuisant qu`il n`a en réalité jamais cessé de mener et que nous avons choisi, en ces moments pathétiques, de restituer à notre manière de profane.

Les fondements et la quintessence de cette croisade sont exposés dans un livre que ce Grand Homme publie en 1976 sous le titre " Emancipation d`Eglises sous tutelle ou Essai sur l`ère post-missionnaire " (Présence Africaine, 1976, 175 pages) et qui fait l`effet d`une bombe dont l`onde de choc va entamer bien des principes de " l`ordre établi " dans les allées feutrées de la Cité du Vatican et bien au-delà. Et encore, il va révéler ou confirmer à la face de la chrétienté, l`éclosion d`un philosophe de talent doublé d`un théologien de référence originale dans la puissance de son engagement. Un intellectuel avec lequel il va falloir dorénavant compter.
Mais venons-en au fait. Les présupposés que Meinrad Hebga énonce d`entrée de jeu dans cet ouvrage ou il invoque le Pasteur Martin Luther King dès la première ligne ne manquent pas de receler, pour l`époque, une certaine témérité, de l`audace et, en tout cas, un courage certain ; voire même tout simplement du toupet :
" Supposez qu`un jour le christianisme ne soit plus le patrimoine de l`Occident, que ses chefs suprêmes ne soient plus des Blancs, que ses théologiens ne soient plus exclusivement européens et américains, ses dogmes de foi définis par les seuls Blancs, son droit et sa discipline établis (…) par les Blancs, sa liturgie et son culte émanés (…) des cultures orientales ou occidentales, et que les peuples de couleur soient admis à y apporter autre chose qu`un peu de folklore (…) ; supposez que les Congrégations et Ordres religieux (…) ne soient plus gouvernés (…) par les seuls Européens et Américains, et que leurs Constitutions tiennent désormais compte de l`être-au-monde des membres africains ; supposez que les experts en affaires indigènes auprès des Supérieurs généraux (…) ne soient plus (…)des Blancs, étrangers à la culture africaine (…) ; supposez (…) ; supposez enfin que les Occidentaux chrétiens, catholiques ou protestants cessent de garder le christianisme comme leur bien propre, ne serait-ce pas une révolution copernicienne dans l`Eglise ? Ne serait-ce pas un bouleversement apocalyptique annonciateur de la fin des temps ? "

Le ton est donné et, de toute évidence, l`enjeu à terme tient dans l`avènement d`une véritable égalité des races et des cultures devant Dieu. L`Homme est catégorique : " Il faut, sans délais, penser et organiser l`ère post-missionnaire, déjà en retard de plusieurs siècles. " Où, quand et comment ? Le débat est ouvert et Meinrad Hebga entre dans le vif du sujet pour ne plus vous lâcher jusqu`à la conclusion de 7 chapitres d`égale intensité.

DE L`ETAT DES LIEUX…

Prêtre de Jésus-Christ avant tout et fier de l`être jusqu`au bout, c`est du Successeur de Pierre qu`il se recommande au préalable par le commentaire de cette injonction comminatoire : " Africains, vous êtes désormais vos propres missionnaires ". En titrant ainsi le premier chapitre de son livre, il reprend en effet les paroles que le Pape Paul VI prononce en 1969 lors du symposium préparatoire de la visite historique d`un Souverain Pontife au Continent noir. C`était à Kampala. C`est aussi une manière de précaution, devant le caractère risqué du réquisitoire qu`il s`apprête à prononcer, des interrogations et questions qu`il va remuer au fil des pages. Parmi ses autres points d`encrage -nombreux et abondamment documentés, il y a le moratoire des Eglises Protestantes rassemblées autour du CETA (Conférence des Eglises de toutes l`Afrique, Lusaka/1974) et les positions du cardinal Malula.
L`irréductible Jésuite choisit comme prolégomènes de dresser l`état des lieux. Sans complaisance et de l`intérieur il dénonce avec vigueur la sujétion qu`exerce les églises missionnaires sur les Eglises qu`elles ont fondées et stigmatise "L`impérialisme des Sociétés missionnaires (…), une maladie très résistante aux antibiotiques spirituels" (p. 23). Son approche est globale. Il parle donc sans exclusive et invariablement de toutes les religions qui sont pratiquées en Afrique, continent sous domination étrangère, dans des termes qui laissent apparaître entre elles une communauté de destin. Et certains hérauts qu`il signale tels Modi Din et Lotin-a-Same pour le Cameroun du début du siècle écoulé, Kibangu Simon pour le Congo belge, la prophétesse Lenshina Mulenga Alice pour la Rhodésie et bien d`autres fondateurs d`Eglises indépendantes, sont, à travers les persécutions et les humiliations dont ils sont victimes, présentés plus sous leur jour nationaliste que sous l`angle de la mission de prédication de l`Evangile.

Progressivement, l`on voit apparaître l`un des nœuds du problème, avec l`évocation d`un article d`une autre figure de proue, à l`époque, de la catholicité : Fabien Eboussi. Ce Bantou problématique vient quelque deux ans auparavant de publier un brûlot désormais célèbre. " De-mission " est son titre. Plus célèbre encore est sa conclusion " Que faire ? Que l`Europe et l`Amérique s`évangélisent elles-mêmes en priorité. Qu`on planifie le départ en bon ordre des missionnaires d`Afrique ! ". Meinrad Hebga, complice, s`interroge : Est-ce pour Demain ? Le débat se poursuit donc sur la question de ce personnel expatrié, ses effectifs, son rôle, son importance, ses motivations réelles ou avérées dans un système qu`ils ont mis en place pour pérenniser leur présence aux rouages vitaux, les modalités de son remplacement par un clergé indigène… L`analyse de l`état des lieux, dans l`intermède, a abouti à la conclusion que nous étions prisonniers d`un type d`église créé par d`autres pour nous.

L`EGLISE DEMAIN EN AFRIQUE…

C`est par ce titre que commence le chapitre IV que nous considérons, quant à nous, comme la deuxième partie du livre. Ici, Meinrad Hebga se manifeste comme une force de proposition. L`enjeu est crucial. Que faire ? En plus clair, comment sortir du cercle vicieux de l`aliénation, de l`aide et de la mendicité ? Quels dispositifs en hommes et en matériels nous faut-il mettre en place pour construire nous-mêmes, non seulement nos lieux de culte, mais aussi nos écoles, nos dispensaires, nos universités, nos librairies, nos imprimeries, nos économats… C`est-à-dire autant d`infrastructures qui confèrent à l`Eglise sa crédibilité et dont la réalisation par d`autres a longtemps légitimé la mainmise étrangère dans un domaine aussi sacré et inaliénable que la Salut de l`Ame. Point par point, centre d`intérêt par centre d`intérêt, Meinrad Hebga instruit, dirige et oriente.

L`apostolat d`abord. Il faut réorganiser les ministères, martèle-t-il. Le niveau de détail est chaque fois impressionnant. Il va jusqu`à remettre en cause de la Sainte Communion -dans la forme, cela va sans dire - : "(…) il ne nous reste qu`à acclimater le froment et la vigne dans nos pays, ou bien nous résigner à faire prospérer le commerce d`autrui …" p. 56. Il y a ensuite le laïcat. Vaste truchement et ambitieux programme. Sur un ton de plus en plus tranchant sinon carrément provocateur, il démonte pour les reconstruire à notre avantage, les Congrégations religieuses avec leurs préjugés racistes et paternalistes, n`hésitant pas à égratigner au passage les siens propres : "(…) Ces religieux et religieuses indigènes, souvent travaillés par un incurable masochisme et un complexe d`infériorité inoculé par la colonisation spirituelle préfèrent pour la plupart la férule étrangère à la direction autochtone". (p.71). Avec le même luxe de détail, il n`oublie pas ses sujets de prédilection que sont la théologie et l`œcuménisme avec la référence d`auteurs parfois inattendus comme Frantz Fanon, L.S. Senghor, Mulango Vincent… et d`autres plus catholiques comme Danielou, Thomas d`Acquin, St Augustin et, parmi eux, un jeune camerounais que certains découvrent en la personne de Jean-Marc Ela. Non sans une pointe d`humour, il nous met en garde contre le danger que " (…) nous érigions en absolu la pensée dite cartésienne, et qui, soit dit en passant existait bien avant Descartes " (p.83). Réaliste, il ne peut pas ignorer que l`Islam, qui rassemble des centaines de millions de croyants, est la religion de dizaine de millions d`Africains. Il est donc partisan de la tolérance et d`un dialogue fructueux là où d`autres continuent à redouter le " Djihad ".

UN AUTRE REGARD SUR NOS RELIGIONS ET COUTUMES

Dans cette dernière partie, Meinrad Hebga qui avait déjà décollé, vole dorénavant à son altitude de croisière qui, vous vous en doutez, n`est pas accessible au premier venu. Ses contempteurs et autres adversaires passés et à venir n`ont qu`à bien se tenir. L`homme est fou furieux et bien décidé à en découdre avec tous ces " (…) Ethnologues, sociologues, journalistes, romanciers, historiens des religions, théologiens de toute confession [qui] n`ont pas jugé nécessaire de définir les concepts qu`ils prêtaient aux africains ". Ils seront confondus un à un, parfois avec une férocité qui n`a d`égal que l`immensité de leur imposture et le scandale de leur aplomb. Par le menu, Hebga va définir et repréciser pour eux (et pour notre bonheur), les concepts et notions tels le paganisme, la sorcellerie, la magie, la religion, le totémisme ou encore le fétichisme à propos duquel il se pose cette question : "(… )n`est-il pas arbitraire de décréter que nos objets religieux sont superstitieux, tandis que ceux importés d`Occident sont dignes de respect ? " (p.96), … Avec la même verve et pour la même cause, il aborde d`autres centres d`intérêt connexes et tout aussi galvaudés telle la dot, les " sacrifices païens ", le mariage chrétien en général…

Avec la polygamie, il est au bord de la dissidence. Il estime en l`occurrence concernant l`imposition de la monogamie par Jésus-Christ comme seule forme de mariage chrétien, qu`aucun texte du Nouveau Testament n`est péremptoire à cet effet. Son texte sur l`historique de la monogamie, comme beaucoup d`autres encore, est un véritable chef-d`œuvre. Du mariage en groupe au mariage consanguin, en passant par le matriarcat et la famille punaluenne ; de l`Ancien Testament avec Salomon, ses 700 épouses et ses concubines, au Nouveau Testament,… le lecteur même le plus averti est au minimum admiratif devant tant d`érudition par la maîtrise illimitée d`un nombre tout aussi illimité de sujets. Et le chrétien ordinaire est encore déconcerté devant cette autre approche que lui propose, parmi d`autres, l`Homme de Dieu : " Selon Engels, le fondement de la famille monogamique n`est pas l`amour [sexuel], mais le triomphe de la prospérité individuelle. L`homme est souverain dans sa famille, il procrée des enfants qui seront héritiers de sa fortune " (p. 113). Nous Africains n`avons décidemment pas de chance ni de marge de manœuvre, nous à qui on demande d`abandonner nos femmes sous peine d`être excommuniés, lors même qu` "En Israël tout monogame était un polygame potentiel" (p. 115). Preuves à l`appui.

Et c`est dans ce contexte que nous en arrivons à ce que Meinrad Hebga dénonce comme "Le mythe des religions animistes". Avec ce nouveau concept, sa rage atteint son paroxysme. Il ne se contente donc plus d`un rappel à l`ordre par de simples définitions. Le débat devient plus technique et sophistiqué. L`annuaire pontifical [excusez du peu] est directement mis en cause, en termes d`abus et de confusions qui induisent pour les Noirs insulte et mépris. Nous tentons un raccourci. L`africain est animiste, synonyme de païen, proche de sauvage, relié à primitif ou barbare… Trop c`est trop. Meinrad Hebga ne fait plus dans la nuance : " Notre dessein avoué est de détruire le mythe qui fait de l`animisme l`essence des religions africaines " (p.124). Et tant pis pour les exégètes qui ont pris le risque d`aller un peu vite en besogne. Ils sont réduits chemin faisant à l`incohérence. Eux, les JC Froelich, Mircea Eliade, LV Thomas (qu`il semble affranchir à la suite du Pr Herkovits)… L`Esthète va devoir mettre à contribution ses connaissances en linguistique pour dénoncer nombre de dictionnaires et autres abaques de référence. Aimé Césaire puis Léopold S. Senghor sont encore appelés à la rescousse. Et c`est ici que le célèbre philosophe Hegel en personne, est débusqué comme raciste notoire. Les propos qu`il a tenu, et peu importe sa stature, sont inadmissibles : " (…) le nègre représente l`homme naturel dans toute sa sauvagerie et sa pétulance … " p. 130. Voilà qui est bon à savoir. Et le fait qu`il ait été induit en erreur en puisant ses sources auprès des missionnaires n`excuse rien. Ce Hegel qu`on enseigne dans nos établissements sans nuance ni procès, Anaxagore, Héraclite ou Platon, rationnels et scientifiques ; ont été plus vigilants. Meinrad Hebga ne peut que s`en réjouir. Et nous en avons probablement oublié comme les Emmanuel Kant, Karl Max, Lucien Lévy-Bruhl, Merleau-Ponty et autres penseurs ici convoqués comme accusés, partie civile ou simple témoin.

UNE AUTRE REFERENCE : JESUS-CHRIST.

Fin de l`Acte III. Un jour nouveau se lève. Meinrad Hebga est catégorique. " ( …) les africains continueront à vénérer leurs ancêtres et désormais de préférence à ceux des pays honorés sous le nom de Saints, bienheureux ou vénérables. C`est un impératif de l`authenticité africaine (…)" p. 146.
En attendant, le bolide doit bien amorcer sa descente, car il va bien falloir revenir sur terre. A ce stade et pour paraphraser le chansonnier, "Que reste-t-il de nos amours ? " La réponse est toute trouvée : Jésus-Christ. Le livre de Meinrad Hebga, en définitive, n`était-il pas conçu et écrit à cet effet ? Sûr ! A quelques encablures de la conclusion, ce nom sacré, béni et glorifié revient encore 21 fois dans le dernier chapitre (p. 119 à 169). Cependant, le brave curé n`est pas dupe. Dans son milieu, il sait qu`il a dépassé les bornes. Son interpellation par exemple de Jean Zoa, Archevêque conservateur de la capitale (pp. 118, 119 et 1120), est très significative à cet égard. En toute humilité, il avoue ses limites " (…), nous avons, intellectuellement et spirituellement parlant, une liberté d`oiseaux en cage (…). La preuve, c`est qu`il suffira d`un froncement de sourcils de la part des autorités religieuses européennes contre cet essai pour que beaucoup de chrétiens même parmi les plus lucides, le vouent aux gémonies " p.159.

Il ne croit pas si bien dire. Quelque deux ans après paraît, sous sa plume, un autre ouvrage : "Dépassements (Présence Africaine, 1978, 89 pages) ". Ce nouveau livre a toutes les apparences d`un tome II du précédent, sauf un détail anodin de prime abord et qui tient dans cette mention en pages préliminaires : "Texte ayant été soumis à la censure canonique "Rétractations ou précisions ? La question continue à tarauder les esprits. Et nous partageons à ce propos l`amertume exprimée par le Pr Paulin Pacouta dans sa contribution" M.P. Hebga, théologien et guérisseur "(Cf. Dialectique de la raison et de la foi, livre hommage à Hebga sous la direction de F.Eboussi, pp 13 à 35)

ET LE BILAN DE LA MOISSON ?

"Emancipation d`Eglises sous tutelle" a été publié il y a plus de 30 ans. Au terme de sa relecture, nous avons été agréablement surpris par sa jeunesse et son actualité. Est ce à dire qu`il ne s`est rien passé dans l`intermède ? Les Eglises Africaines - et singulièrement l`Eglise catholique Camerounaise, sont-elles toujours sous tutelle ? Meinrad Hebga, s`il avait à recommencer, écrirait-il le même livre ? Sans être exhaustif, nous pouvons esquisser ici des ébauches de réponses, en termes de bilan. Un bilan largement positif. Une moisson débordante que l`on peut aisément, directement ou in directement, imputer à Meinrad Hebga et à ses semblables.

D`abord son mérite propre et intrinsèque. Et pour commencer, l`incroyable fécondité de sa production intellectuelle : une dizaine d`ouvrages, des fascicules et articles innombrables, un journal " Le Paraclet ", des conférences incessantes à travers le monde… Nous nous arrêtons là. Pour le reste, l`Homme ne se contentait pas de parler, de critiquer. Il a toujours joint l`acte à la parole. Le groupe charismatique "Ephphata", en est l`illustration la plus à jamais vivante : 50 000 adhérents au bas mot, à ce qu`il paraît ! Le Centre de prière et de guérison de Mangen est connu de tous, vu son emplacement sur " l`axe lourd " Douala Yaoundé. Moins connu est le stade de prière de 4 000 places qui a été recouvert il y a trois mois à Nkolbisson et dont le Maître d`Ouvrage ne verra pas la phase opérationnelle. Lui, en a décidé autrement. Et comment l`ancien élève du Collège Libermann qui écrit ces lignes pourrait oublier son recteur, un certain Meinrad Pierre Hebga (19667, 1978). Un privilège inouï ! L`homme y avait institué, entre autres innovations : les mathématiques dites modernes, l`Africanisation de certaines disciplines comme la Philosophe ou l`Histoire ; la modernisation des laboratoires scientifiques avec l`appui du Père Physicien Crougneau, la promotion d`un Dictionnaire Français-Bassa avec comme auteur le Père F. de Gastines… l`enseignement obligatoire des langues camerounaises…

Mais il y a encore d`autres victoires, plus quotidiennes dans leur manifestation, et donc moins perceptibles :
- Un Cardinal en exercice, et semble-t-il un deuxième en perspective, si l`on s`en tient à la rumeur. Les Hebga et cie n`ont combattu que pour cela !
- Le triomphe de l`universalité par le démentellement de " (…) l`organisation tribaliste et clanique de l`Eglise ", avec Mgrs Tumi et Kléda à Douala, Tonyè à Yaoundé, Atanga, un Beti pur sang a Bafoussam. Qui l`eut cru ?
- Les nombreuses infrastructures de toutes sortes et dans toutes sortes de domaines, réalisés et gérés par un clergé quasi exclusivement indigène, n`est-ce pas le fait des sacrifices consentis par les précurseurs ?
Et que dire du laïcat ? Toutes religions confondues au Cameroun, il est irrémédiablement " engagé ", à l`exemple des Fotso Victor et autres Louis Yinda..., mécènes impénitents et bâtisseurs de cathédrales.

Mais parmi ces victoires, il y en a une en particulier qu`il aurait été injuste de signaler. L`une des plus significatives. C`est la tenue à Yaoundé en septembre 1995 d`un Synode, couronnée par la présence du Souverain Pontife en personne. Avec ces assises, le Vatican cédait devant l`une des revendications les plus structurantes de l`Intelligentsia catholique Africaine. Une demi victoire cependant ! Les Mveng ; Eboussi et leur compère Hebga avaient, eux et d`autres encore, réclamé manu militari plutôt la tenue d`un Concile.

Mais concluons !

Concluons pour dire qu`avec la mort de Meinrad Pierre Hebga, le Cameroun, au-delà de la chrétienté toute entière, vient de subir une très lourde perte. Pasteur, exorciste, théologien, philosophe, sociologue, parapsychologue, physicien et mathématicien (il est auteur d`un traité à cet effet), linguiste, enseignant,… Il était tout cela à la fois. De sorte que cet homme pluridimensionnel était en définitive un véritable scandale en lui-même. Et à l`observer, l`on ne pouvait résister à l`envie de lui emprunter son propre questionnement à propos des Noirs : " Dieu est-il juste ? " (p.30). Franchement, il lui a tout donné. Meinrad a eu sur cette terre tout ce que l`on peut désirer et envier : la beauté physique (il fallait l`avoir connu dans les année 70 !), le brio, la prestance, l`élégance et le charme et l`éloquence plus que tout encore, le don des langues dont il parlait couramment une dizaine… Et comme si cela ne suffisait pas, Dieu lui a donné encore le don du détachement et du partage, la simplicité, faisant ainsi de lui son humble serviteur, au service quotidien des autres.
Nous allons donc prier, prier et prier encore afin qu`il ne s`arrête pas en si bon chemin.
Au revoir Tonton


Philippe Bissek
Architecte et essayiste occasionnel.
 

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