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27.05.2006
Sawanité et Pacte des Générations de la lettre à l’esprit
Frères et sœurs sawa , que dire, bona Bam, je m’arrête un instant de soliloquer seul, assis sur mon écritoire, à ces heures perdues des nuits glaciales d’Europe où seuls viennent troubler les clicks de ma vielle souris. Je vais vous parler avec la pureté du cœur, comme lorsque la langue de bois actuelle n’était pas encore cet espèce de marchepied académique, ni cette caution du talent et du bon goût. Je vais vous parler avec la plus simple manière de communiquer avec sa famille : la sincérité. Mais déjà, j’ai des frissons à l’idée de cette mise à nue de moi. Qu’importe, la force de la franchise est comme celle de la nature, lorsqu’elle reprend ses droits sur les hommes on y peut rien.
A bona Bam, toute ma petite vie est essentiellement une marche, tour à tour lente et la fois précipitée, à la conquête du bonheur intérieur et à la recherche du partage. Je m’efforce comme beaucoup d’entre vous à vivre debout dans l’espoir aussi de mourir debout. Mais ce n’est pas toujours aisé de chercher des réponses à sa propre condition. Il m’est arrivé de d’avancer dans ma vie comme sur un fil instable, au bord du précipice. Ma vie comme celle de beaucoup d’enfants côtiers a été et est une véritable traversée du temps et des épreuves. Dans mes chemins de l’existence des joies, des peines se sont alternées et succédées en pointillés. Les interrogations m’ont parfois gagné dans la douleur, dans le chagrin de l’impuissance sur l’instant. Certaines parenthèses de mon existence s’identifiaient parfois à un lieu où le bonheur s’apparentait plus à un échos d’outre-tombe. Mais fort heureusement, les secrets, quelques secrets de la nature humaine se sont aussi révélés à moi comme autan de cicatrices que je porte à l’âme.
Ne croyez surtout pas que je n’ai jamais été à l’origine de certaines de mes contrariétés. On n´est jamais tout à fait innocent des malentendus dont on peut se retrouver victime.
Enfants des marées, enfants des vagues, voici venu le gong qui sonne le glas à la recréation. Le ton est donc donné. Le ton doit s’affirmer comme une composante irréductible de l’enclenchement des initiatives humaines auprès des projets. Non seulement parce qu’il est de notoriété publique qu’il invite, mais parce que bien donné, il encourage, il booste. Et c’est là le charme de certain ton.
Ce ton Dr Paul Menessier Ngallè à l’auguste mérite de l’avoir donné avec force, vigueur et clairvoyance. Si ce ton avait été une note il aurait été un la. Autrement dit, cette note tenue qu´on entend encore quand le son musical s´évanoui. Il y aura donc de nous des pas, des trots, des galops, des petites foulées, l´indispensable étant que cette avancée ait lieu sur le sentier de notre Sawanité. Mes frères et sœurs, une invitation comme celle là nous montre qu’il ne faut jamais perdre de vue qu’on peut concevoir un concept dépassant les particularismes surtout quand l´intégrité d’une communauté est en jeu. Bien plus, Nous devons nous aussi croire en la vertu de l´exemple lorsqu´il s´agit d’un engagement collectif. La Sawanité appartient donc à cette catégorie de propositions peu nombreuses pour qui l’esprit de rassemblement par delà les différences est le moteur. C’est éthiquement que ce vocable à son élégance, inutile de le chercher dans ses consonnes. Ses aspects savamment défendus devront inévitablement planer pas dans les cieux d’aimables et modernes Sawa que nous sommes.
Cher famille, si nous sommes d’accord que cette déclarations de principes reprise dans la feuille de route constitue un acte refondateur majeur du Grand Sawa et que la contradiction fraternelle en ligne est la première des énergies à réguler, on ne doutera pas un instant que tout enfant Sawa quel qu’il soit, quelque soit sa sawanitude soit le bienvenu sur cette toile. L´idéal de Sawanité ne s´oppose qu´à certaines tentatives d’idéologisation de nos existences, non à la conceptualisation qui lui est aujourd’hui nécessaire. La Sawanité loin d’être achevée, cherche donc à restaurer le primat de la créativité et de la fierté des fils et filles sawa sur les contingences et les vicissitudes de notre difficile quotidien. Pour cela donc, elle est en perpétuel devenir et reste pour cela plus évolutionniste que révolutionnaire. Ce qui n’empêche personne d’en faire une révolution. La révolution n’étant pas un passage obligé mais une affaire de circonstance et d’engagement.
De toute façon la vocation identitaire et rassembleuse de la Sawanité est et reste indéniable. S’impliquer à la construction de ce concept est la seule entreprise à laquelle puisse adhérer tout Sawa, y compris ceux même qui ´adhèrent à rien. Je ne suis pas un triomphaliste béat. Mais je me réjouis du fait d’avoir eu raison comme certains d’entre vous d’espérer un printemps fleuri dans nos relations. D’ailleurs au fond de moi-même, il m’a toujours semblé que nos réflexes de défenseur du beau, du bien et surtout du juste n’étaient pas timorés, mais en vacance. Oui, n’en déplaise aux adeptes du mutisme, la voix et la parole sont redevenues notre force. Une force indomptable qui, en devenant la clameur de toute une cause, pourrait rectifier bien des comportements et mener à des havres de lumière et d´espérance. Et si mes frères des causes aussi fondamentales que la Sawanité et le pacte des générations ne trouvaient pas preneurs dans notre communauté côtière. Il ne resterait plus à notre engagement virtuel ou réel que le vide structurel qui accompagne nos sautillements à parler du Mboa.
Maintenant qu’il est désormais établi que le Grand Sawa virtuel a droit de cité et qu’aux rapports de force entre nous peuvent se substituer des relations tournant le dos à la haine, le moment n’est-il pas venu de reinscrire notre élégance de Sawa dans l’air du temps.
Non: plus jamais l’indifférence mes frères, plus jamais le mépris. La dénonciation, oui. Oui au non-conformisme opiniâtre qui permet, finalement, de laisser derrière nous l´horreur de la suspicion, de la contrainte, de la haine, et de pénétrer dans cet espace de rencontre et de partage dont nous rêvons si souvent lorsque nous parlons de Sawanité. Nous le savons tous mes frères demain n´est pas plus écrit qu´hier : l’opportunité de nous pencher sur la mise sur pied d’un pacte de générations qui à jusqu’ici fait défaut sur le chantier de la Sawanité nous amène d’une certaine façon à bien réviser les leçons de l´histoire et à chercher si les descriptions des échecs actuels n’y sont corrélés. Mais, par dessus tout, ce débat nous invite aussi à écrire le bonheur tous ensemble. Le seul moyen d´atténuer la douleur et la mémoire des blessures passées, c´est d´oser, avec imagination et constance, parcourir ensemble, concevoir ensemble, vivre ensemble, tous différents, tous égaux, tous uniques, tous unis par quelques valeurs universelles, le temps et l´espace que nous avons encore intacts devant nous. C´est le meilleur des héritages.
Osons dire et sachons aussi écouter. Ouvrons davantage nos bras à l’amitié. Soulevons nos visières et regardons au loin. Ce qui importe est ce qui se cache au détour la vague, les vallées au-delà des montagnes proches qui nous empêcheraient de contempler l´horizon. Ensemble sur la corniche, dans la brume du mont Fako, à la lisière même de la lumière et de l´ombre. Avec plus d´incertitudes que de certitudes. Mais avec l´espérance, car l´avenir est là, dans l´attente des sillons, de l´eau et des semences. A bana Ba Mboa semons encore, semons toujours le courage et l’amour, sans penser à la récolte. Nombreuses seront les graines qui ne germeront pas, mais il est un fruit que nous ne pourrons jamais récolter : c´est celui de la graine que nous n´auront pas plantée. Difficile de porter le double deuil du courage et du cœur. Enfant Sawa quand on te dira qu´il n´y a pas de remède à la désunion constatée des tiens, ne le crois pas. C´est que nous n’avons pas encore suffisamment soudé nos coudes. C´est qu´on n´a pas su voir delà du plaisir égoïste de chacun. A chaque instant, il faut aller de l´avant, inventer et tracer le parcours de la retrouvaille. Les réponses sont en nous, jamais au-dehors. Il faut être à l´écoute de tous et de tout, et ensuite être libre, obstinément libre, c´est-à-dire proposer des pistes en toutes indépendance. Que ce soit le résultat de ta réflexion qui te guide et non pas une raison d’emprunt ou une main manipulatrice.
La Sawanité sera donc une de ces écoles où se forgera à coup sûr une nouvelle quête de sens :à la fois de haut niveau étant donné la qualité du message de concorde communautaire qu’il veut faire passer, et symbolique, tant il est vrai que, dans des conditions de cohabitation présentes, ce type de philosophie essaie de s’étendre à la totalité des côtiers Camerounais. Alors, se désengager de l’individualisme, penser et agir en termes de dignité au service du développement, savoir reconnaître l’humanité de l’autre dans une relation qui assoie la complémentarité des pensées autour d’une commune vision d’émergence et d’épanouissement ; voici qui change des donnes habituelles de nos regards entre nous. Voilà aussi l´espérance d’un Grand Sawa enfin rassemblé dans la capacité créatrice de tout être humain. Dans la résistance à l´inertie et à la routine. Dans le refus du trivial.
Délit de silence, Non ! Nous devons travailler sans relâche pour unir nos voix, jusqu´à ce que nous réussissions à présenter aux yeux du Cameroun une vie plus harmonieuse où nous pourrons enfin nous regarder en face. Il nous faudra, je le sais, beaucoup de courage pour continuer à changer, avec la seule force de la parole et du coeur, ce que nous n´avons pu ou su réaliser avec les lois et le bon sens. Mais n’est ce pas ce courage qui nous a conduit aujourd’hui à dépasser les dissensions qui nous ont miné ces derniers mois ?
Un jour, sombre de 1914, sur le plateau Joss , quand la passion et la compassion gagnaient tant de rivages ; l´esprit et les yeux remplis d´horreur devant tant de souffrance indescriptibles, à un de nos Chef Résistant et à son téméraire Sécrétaire , nous avons trouvé l’ultime force de leur promettre solennellement le refus de l’occupation Allemande, de la haine et l’exploitation. Aujourd’hui il ne s’agit pas seulement d’honorer les promesses que nous n´avons pas tenues ; mais aussi prendre en compte cette nouvelle menace qui est l’usure de l’unité et l’érosion de l’exemplarité vertueuse. Cependant, la recherche de l’union et des valeurs sont l´affaire de chacun(e) en son âme et conscience et ce n´est pas le moindre des labeurs au regard de nos différences que de tendre vers cet objectif.
Bana Ba Mboa, toutes les glaives sont nécessaires à ce noble combat, toutes les truelles sont attendues pour cette refondation. Vous êtes tous des personnes-ressources dont notre mignonne côte à besoin.
Vive le pacte des générations et que prospère notre Sawa natal.
Mandjomb’ a Bossambo iTuéd’a muna Mulimba
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